Non la lutte n’est pas terminée. Des processus de lutte nouveaux, un débat parlementaire qui patine, une opinion publique qui exige le retrait du texte très majoritairement…Les éléments pour garder confiance demeurent nombreux. Revenons dessus ….
Les éditorialistes appointés peuvent bien continuer à distiller leurs consternants éléments de langage, preuve que ce « journalisme assis » n’est jamais loin du journalisme couché, le réel semble apporter un cinglant démenti aux élucubrations mensongères des suppôts de la Macronie. Les salariés et les citoyens sont capables de penser par eux même sans s’en laisser conter par les chroniqueurs stipendiés.
Bien-sûr pour exonérer la radicalisation de cet exécutif en guerre sociale contre la société toute entière, cheminots, conducteurs de bus ou de métro, éboueurs, infirmières, médecins hospitaliers, avocats, orchestres et danseuses de l’opéra, salariés de Radio France, chercheurs et travailleurs précaires, toutes les dénégations seront encore une fois de mise.
Le mouvement serait entré dans une phase de reflux ?
S’il est vrai que les salariés de la SNCF et de la RATP, placés à l’avant-garde du mouvement ont été contraints de reprendre partiellement le travail, en raison de la perte drastique de revenus occasionnés par ce conflit de longue durée, rien ne vient justifier les prédictions hasardeuses des éditocrates lobotomisés et autres chiens de garde de BFM.
Nonobstant ce matraquage médiatique, chacun sait que loin d’être en décrue, le mouvement social ne cesse de s’enraciner dans l’opinion publique et de s’étendre par coalescence à de nouveau secteurs sociaux, à l’instar des pompiers, des avocats, des dockers et des raffineries, des chercheurs ainsi que les étudiants et les lycéens, les grands sacrifiés du projet de réforme sur l’autel de la règle d’or budgétaire.
A preuve, plus de 40 jours après le début de la grève, l’adhésion de la société au mouvement ne faiblit pas, à l’instar des résultats du baromètre Harris Interactive, faisant apparaître que 60% des Français indiquent soutenir la contestation contre la réforme des retraites. Quant au projet de loi, 67% des personnes interrogées se disent inquiètes, eu égard à la création envisagée d’un régime « universel » des retraites, synonyme de paupérisation généralisée.
Il est vrai que l’avis certes consultatif rendu par le Conseil d’état a de quoi ouvrir l’esprit des plus frileux. L’étude d’impact s’avère « insuffisante au regard des prescriptions de la loi du 14 avril 2009 », s’insurge la plus haute juridiction administrative en rappelant que les documents d’impact doivent satisfaire aux exigences générales d’objectivité et de sincérité. Et d’ajouter sans plus de précaution oratoire que« les projections financières demeurent lacunaires », enjoignant d’améliorer ces dernières quant aux différences qu’entraînent ces changements législatifs sur la situation individuelle des assurés, en particulier sur la hausse de l’âge de départ à la retraite, le taux d’emploi des seniors, les dépenses d’assurance-chômage et celles liées aux minima sociaux.
Le Conseil d’état visiblement agacé déplore « une saisine des organismes chargés d’émettre un avis, trop tardive » et de souligner que, au regard de « la date et aux conditions de sa saisine, ainsi qu’aux nombreuses modifications apportées aux textes pendant qu’il les examinait, la volonté du Gouvernement de disposer de son avis dans un délai de trois semaines ne l’a pas mis à même de mener sa mission avec la sérénité et les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la sécurité juridique de l’examen auquel il a procédé. Cette situation est d’autant plus regrettable que les projets de loi procèdent à une réforme du système de retraite inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir un système social qui constitue l’une des composantes majeures du contrat social. »
De surcroît, le Conseil d’État pointe sévèrement le choix de recourir à 29 ordonnances, y compris « pour la définition d’éléments structurants du nouveau système de retraite », ce qui « fait perdre la visibilité d’ensemble qui est nécessaire à l’appréciation des conséquences de la réforme et, partant, de sa constitutionnalité et de sa conventionnalité ». On ne saurait mieux dire !
Il est vrai que le recours à la voie des ordonnances, s’il est conforme à l’article 38 de la Constitution, revient à faire voter les députés et les sénateurs en méconnaissance des effets qu’entraînerait l’adoption d’un texte destructeur pour les fondements du système de retraite de répartition, preuve supplémentaire de la désinvolture et du mépris affichés par cet exécutif pour la représentation parlementaire, les corps intermédiaires et partant pour l’ensemble de la société. Si l’on déchiffre bien l’avis du Conseil d’état, on mesure bien que le gouvernement flirte dangereusement avec la transgression des normes constitutionnelles réputées supérieures et donne des clés pour que les 70 députés et sénateurs qui d’aventure saisiraient le Conseil Constitutionnel disposent de toute la jurisprudence opposable au projet de loi.
Dans le même élan s’agissant de la « conservation à 100% des droits constitués » au moment de la bascule entre le système actuel et le futur « système universel »(SUR) le Conseil d’état appelle à une clarification « particulièrement cruciale », à tel point « qu’en l’absence d’une telle ordonnance » la réforme « ne s’appliquera pas » aux personnes nées à partir de 1975.
Enfin, l’engagement de revaloriser les enseignants et les chercheurs via des loi de programmation est condamné à disparaître du texte car « ces dispositions constituent une injonction au gouvernement de déposer un projet de loi et sont ainsi contraires à la Constitution »
En clair un camouflet sans appel est infligé à ce gouvernement d’amateurs et d’apprenti-sorciers.
Et ce n’est pas tout il faut faire crédit à Mélenchon, ce qui ne vaut pas allégeance au leader de la France Insoumise d’avoir levé un lièvre de taille concernant la valeur de la valeur du point subordonné un indicateur dit du « revenu moyen par tête », devant être défini par l’INSEE mais validé par un décret en Conseil d’état, le tout devant servir pour déterminer l’équilibre financier du nouveau régime de retraite. En clair un bel imbroglio supplémentaire qui en dit long sur l’absence de respect et de sérieux caractérisant ce gouvernement de Gribouille. Dans le même temps, ce sont des dépités de la République en Marche qui sentant le vent du boulet passer au-dessus de leurs têtes saisissent le premier ministre afin d’obtenir des indications plus sérieuses sur l’impact budgétaire de la contre-réforme. Décidément l’étude d’impact bâclé du gouvernement ne fait même plus recette dans ses rangs.
Nonobstant ces leviers permettant d’engager une bataille juridique et ou parlementaire, nul doute que ce gouvernement et les forces sociales minoritaires qui le soutiennent ne renonceront pas à passer en force. Il ne dispose désormais que de deux boucliers pour piétiner la contestation sociale, l’appareil de répression et les média dominants aux ordres.
Pour autant, la durée du conflit social et sa popularité sont de nature à consolider et étendre le bloc social entré en mouvement contre cette réforme inique.
Et ce ne sont pas les défections des organisations traditionnellement « conciliatrices » de type CFDT ou UNSA, toujours enclines à la compromission qui réussiront à démanteler cet arc de forces sociales, y compris à l’égard de leurs propres bases syndicales qui ont su courageusement résister dans certains secteurs à la capitulation de leurs directions.
Pour tout dire la lutte des classes, loin d’être un archaïsme relégué dans les greniers d’un passé « archaïque » reprend force et vigueur face aux adeptes du « dialogue social », toujours prompts à courber l’échine devant les possédants et l’état managérial dans sa version macronienne.
Il n’est que de constater la multiplication des modes d’action alliant l’impertinence à la radicalité pour se convaincre que face à ce gouvernement disposant d’une assise sociale de plus en plus rétrécie, un bloc social majoritaire peut et doit se structurer pour mettre échec cette attaque sans précédent contre le monde du travail et tout particulièrement les salariés e les plus précaires ayant eu des carrières discontinues, les femmes souvent en temps partiel et surtout les jeunes non encore entrés sur le marché du travail qui subiront de plein fouet cette régression sociale.
C’est dire que cette bataille qui est loin d’être terminée peut et doit être gagnée. Chaque jour de nouveaux éléments donnent des raisons de gagner en détermination, soit par l’entrée en lutte de nouveau secteurs, soit par des formes d’action inédites et efficaces.
D’autres couches de la société sont appelées à grossir les rangs de cette opposition sociale, sans précédent par sa durée et par sa détermination.
Reste à chacune et à chacun de bien mesurer l’enjeu et contribuer par tous les moyens à fortifier ce mouvement d’ensemble, y compris au sein des administrations parisiennes de la préfecture de police.
La pluie de contre-réformes qui s’abat sur nous depuis l’élection par défaut du président manager est sans commune mesure avec les attaques subies depuis plusieurs décennies.
Que l’on songe simplement à la loi de transformation de la fonction publique qui va faire de la précarité la règle et le statut l’exception et l’arrivée de cheffaillons managers issus du privé, chacun peut mesurer l’ampleur des dégâts annoncés pour les agents d’aujourd’hui et de demain comme pour la qualité du service public, piétiné jusque dans ses fondements. Dans l’exposé des motifs de son projet de loi portant réforme sur le système de répartition le gouvernement se veut l’apôtre de la société du risque, renvoyant chacun à une logique assurrantielle individualisée en lieu et place des mécanismes de solidarité collective et intergénérationnelle.
On sait bien que tapis dans l’ombre, assureurs et hedge funds s’apprêtent à marchandiser avec délectation notre vieillissement. Une manne que le capital financier projette de confisquer à la société , avec l’aide d’un gouvernement cynique et destructeur. Reste que certains seront « plus égaux que d’autres » (pour paraphraser Coluche) face au vieillissement et surtout à l’espérance de vie en bonne santé.
Cette stratégie de liquidation d’un acquis de civilisation (le système par répartition) et d’appauvrissement revient à faire de nos vies, pendant et au-delà du travail, une simple variable d’ajustement des finances publiques et une niche de diversification pour la finance aux appétits illimités.
L’heure n’est pas à la résignation !
Il faut saluer à cet égard la pétition initiée par un certain nombre de personnalités en faveur de l’organisation d’un référendum sur le projet de loi portant sur le système de retraite. C’est un outil de popularisation du mouvement en cours qui répond à une véritable exigence démocratique d’autant que selon un récent sondage IFOP 67% des français s’y montrent favorables (soit 2 français sur 3) et que 56% des personnes interrogées, inscrites sur les listes électorales voteraient contre l’instauration d’un « système universel par points ». (enquête réalisée du 11 au 12 février 2020)
L’heure est à la contre-offensive généralisée face à cette logique de prédation généralisée !
A chacune et à chacun d’y contribuer, par tous les moyens !
Pour signer la pétition exigeant un référendum, le lien ici