Dans le contexte de recul social que nous connaissons et malgré les nombreuses mobilisations dans tous les secteurs, le « tous ensemble » demeure actuellement un vœu pieu. Problème de stratégie ou d’orientation? Le problème est posé par des organisations syndicales CGT du Nord qui souhaitent un véritable débat préparatoire au 52 ème congrès de la CGT qui aura lieu en 2019. Notre syndicat s’associe à cet appel…
« Proposition pour un texte d’orientation du 52ème Congrès de la CGT »
Le monde du travail est en péril. Depuis près de vingt ans, non seulement il n’a pu conquérir aucun droit nouveau significatif mais une grande partie des avantages qu’il a arraché au cours du 20ème siècle ont été démantelés.
Ces défaites successives nous permettent de mesurer la réalité des rapports de force actuel dans le cadre de la lutte des classes. Ces rapports de force ont rarement été aussi favorables au capital.
C’est évidemment la conséquence d’un affaiblissement considérable de l’action syndicale notamment celle de la CGT. Non seulement notre capacité à mobiliser les salariés est particulièrement diminuée mais notre détermination à entrer en conflit avec le patronat et les actionnaires est de moins en moins visible.
Dans ce contexte les gouvernements qui se succèdent depuis une génération ont pu appliquer le modèle économique et social du MEDEF sans jamais être menacés.
Le développement de stratégies syndicales laissant penser que la négociation par délégation peut permettre une amélioration de nos conditions de vie a mis à mal notre aptitude à construire des rapports de force à la hauteur des enjeux (réformes des retraites, privatisations de secteurs complets, licenciements et chômage de masse etc…).
Les luttes engagées contre la destruction du code du travail en sont le dernier exemple :
Le 14 juin 2016, après des mois de luttes isolées et une violente répression, 1 million de travailleurs étaient dans la rue contre la loi El KHOMRI, le mouvement est interrompu au bénéfice de l’été 400 000 travailleurs dans la rue avec la seule CGT dès la rentrée 2017 contre les ordonnances Macron, mais pour poursuivre il fallait attendre que les syndicats réformistes nous rejoignent …
Il en résulte un énorme désarroi et un sentiment d’impuissance.
Disons-le tout net, nous les militants « de la base » sommes démunis face aux travailleurs résignés et consternés par l’incapacité de notre organisation à fédérer les luttes et les colères.
Ça ne peut plus durer !
La CGT est une organisation révolutionnaire !
C’est la dernière grande organisation populaire qui, dans ses statuts, prend acte de la lutte des classes et s’engage à combattre le capitalisme en vue d’abolir le patronat comme le salariat.
La CGT est traversée aujourd’hui par deux grandes orientations qui s’expriment partout dans le syndicat.
Dans ses structures au sein des entreprises, dans ses organisations professionnelles et interprofessionnelles, deux pratiques de l’action syndicale coexistent.
La première orientation est parfaitement définie par la charte d’Amiens:
« La CGT reconnaît la lutte de classe qui oppose, sur le terrain économique, les travailleurs en révolte contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, tant matérielles que morales, mises en œuvre par la classe capitaliste contre la classe ouvrière ; Dans son œuvre revendicatrice quotidienne, la CGT poursuit la coordination des actions pour l’accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d’améliorations immédiates, telles que la diminution des heures de travail, l’augmentation des salaires, etc. ;
Mais cette besogne n’est qu’un côté de l’œuvre du syndicalisme ; il prépare l’émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste.»
La deuxième orientation reconnaît que le capital et le travail peuvent avoir des intérêts communs, que la négociation pour l’amélioration des conditions de travail des salariés, à travers un dialogue dit « social », ne requiert pas nécessairement un rapport de force et que le conflit avec l’employeur n’est pas toujours le meilleur moyen de défense des salariés.
Elles sont très différentes. Aucune ne doit être stigmatisée, ni par les uns, ni par les autres, pour la simple raison que ces deux orientations traversent le monde du travail. Elles sont le miroir des rapports de forces réels.
Mais il est temps aujourd’hui de poser clairement le débat démocratique, ces deux orientations syndicales ne peuvent plus être suivies en même temps par la CGT.
Nous proposons donc d’ouvrir un grand débat au sein de notre organisation et de le lancer à l’occasion de la préparation du 52ème congrès confédéral. Un débat de fond, ouvert et constructif, entre les partisans de chacune des deux lignes.
Ce prochain Congrès de la CGT se déroulera du 13 au 17 mai 2019, à Dijon. Il doit permettre aux adhérents de définir démocratiquement quelle orientation doit poursuivre notre organisation, en donnant un mandat clair aux délégués, désignés par les syndicats au Congrès et à la Direction Confédérale qui sera élue.
Les organisations signataires ci-après invitent à ouvrir le débat en rassemblant tous les camarades des syndicats de la CGT qui se reconnaissent dans la charte d’Amiens.
Nous voulons travailler, sur la base d’une confirmation des principes de la charte, à l’élaboration d’un texte d’orientation pour le prochain Congrès Confédéral.
Rien dans les statuts de notre organisation ne s’oppose au fait que des bases puissent s’organiser pour élaborer un document d’orientation qui pourra être proposé, mis au débat et au vote du 52ème Congrès Confédéral de la CGT. C’est cette volonté démocratique qui doit nous animer.